0335
Par userem7803 le lundi 29 décembre 2008, 12:42 - Divers - Lien permanent
Il est communément admis que partir est une fuite et que les problèmes vous poursuivent où que vous soyez. On pourrait croire que j'en suis une preuve vivante, pourtant je n'adhère pas à cette idée. La difficulté consiste à déconstruire son esprit pour le reconstruire, or le voyage, l'expérience permettent de découvrir de nouvelles options tout en révélant certains fonctionnements personnels. Je ne regrette pas d'être partie, et, contrairement à ce que je vis actuellement, ne regrette pas d'être là. La difficulté est une autre histoire, la nostalgie de la ville qui coule dans mes veines est bercée d'illusion. Mon âme se meurt d'un Paris qui n'existe nulle part, d'un Paris qui renvoie autant de promesses d'ailleurs que Bangkok disparaissant sous une ville futuriste de nuit.
L'Orient, bien que peuplé d'être humains, s'apparente à une autre planète. Si nous avons en commun le physique, le langage, les attitudes (consommer, se nourrir…), jamais en revanche nous ne le feront avec le même esprit, la même dynamique, la même 'raison'. J'emploie des mots inconfortables qui nous ramènent à cette impasse : l'incompréhension. Rationnaliser un mode de fonctionnement si éloigné ne fait que nous en éloigner davantage.
Bien qu'au sein d'une même culture l'incompréhension domine, (qui de dire, qui de comprendre, tous d'interpréter) reste une évidence culturelle qui nous permet de reconnaitre une couleur et de l'associer à tout ce qu'elle représente dans notre histoire. L'assemblage de ces références, d'une couleur à un mot, d'un mot désignant un objet à un terme abstrait…, nous permet de communiquer, d'oublier l'incompréhension profonde et d'aller de l'avant dans un univers commun.
L'occidentale que je suis, entourée de thaïlandais, n'a d'autres choix que de déconstruire une vision du monde pour en reconstruire une nouvelle. Il ne s'agit pas d'éradiquer la culture occidentale, mais de créer une culture personnelle faisant appel à mes racines et me permettant de vivre seule entourée d'inconnus aux repères opposés.
Ma première approche était la bonne, l'esprit vide, prenant les choses comme elles viennent. Après avoir emmagasiné des expériences, bien trop tôt j'ai commencé à faire une synthèse, qui m'aurait permis d'analyser le comportement, d'en dégager les grandes lignes et de l'intégrer à mon lot Occident. En somme de transformer l'Orient pour qu'il fasse partie intégrante de l'Occident. Du colonialisme. Fatale erreur qui donna lieu à une désolation et un jugement critique et destructeur d'un peuple dont je ne comprends rien.
J'observe les gens et leur propension à ne rien faire. Les gardes sont légions (gardiens de parking, de tout et n'importe quoi), et passent leur journée sur une chaise. L'étonnement s'est accru en voyant un enfant d'un huitaine d'année, seul, dans un parc de jeu, assis sur une barre métallique, le genou replié, immobile. Il ne regardait rien en particulier, ne faisait rien de particulier, il était là, tel un oiseau au repos. A quoi peut-il dont penser ? A quoi peuvent-ils donc penser ces journées entières, statiques, le regard glissant sur ce qui les entoure sans jamais laisser poindre un intérêt quelconque ? J'ai posé la question, l'on m'a répondu que c'était impossible à expliquer. Le temps est présent, c'est tout. Un occidental n'a pas la même perception du présent instantanément lié au passé et au futur. Faudrait-il considérer le présent comme une entité temporelle qui s'étend sur la vie ?
La raison semble le maître mot de nos différences, là où nous passons notre vie à en chercher (bien qu'en ayant trop de paradoxales), ils ne s'en encombrent tout simplement pas.
L'étude de la langue renseigne sur leur structure d'esprit. Des mots, pas de grammaire, des accents qui différencient les mots, pas de temps.
Je ne ressens pas l'envie de m'immerger dans cette culture au point d'en parler la langue que je trouve laide (à l'opposé de l'écrit), pour entamer des discussions qui, traduites dans mon cerveau d'occidentale, s'associeraient à un dialogue d'enfants de 6 ans.
La culture des centres commerciaux m'effraie, m'épuise, la surconsommation nouveaux riches, le culte de l'apparence, et par dessus tout un matérialisme que rien ne surpasse si ce n'est occasionnellement une superstition de prévention. Le bouddhisme s'est dissout, base effective de ce peuple, laissant des traces de couleurs, des temples, des moines, et beaucoup de superstition.
Serais-je capable d'intégrer le mystère que représente cette culture asiatique ? C'est toute la question. Il ne s'agit pas de chercher une Réponse, il y en a trop, mais de construire sa façon d'appréhender le monde. Les réponses disponibles ont en commun une finitude, un rétrécissement de notre environnement et vision pour nous ériger un humain grandement façonné. Pourquoi pas me direz-vous, et en effet, pourquoi pas. Seulement j'aimerais construire un univers mouvant, qui avance avec le temps, quel que soit son présent.
Vaste programme, qui non content de ne pas porter ses fruits, m'incite cramer les arbres. Un début de jachère certainement.
Commentaires
un début de réponse