quelquepart

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jeudi 27 novembre 2008

0326

La tension commençait à être perceptible aujourd'hui. A mon retour, aux environs de 16h30, les hélicoptères sillonnaient la ville (j'y vais un peu fort, un). Je devais me coucher tôt en vue d'un réveil à 4 du mat afin de retrouver un hawaïen pour aller visiter le marché à la viande. Un appel plus tard, j'apprends que les vendeurs sont en grève : le propriétaire du terrain veut le vendre pour ériger un centre commercial. Au cours de la même conversation téléphonique, l'on m'informe que le coup d'état est prévu pour ce soir (il est 19h42, il fait nuit depuis bientôt deux heures). J'appelle l'hawaïen pour le prévenir, après être sorti faire un tour, il me confirme que toutes les rues adjacentes sont fermées, barrées par des policiers. La fenêtre ouverte, j'entends les sirènes… à suivre.
20H56, rien à signaler dans le coin. Les sirènes devaient être issues des nombreux hélicoptères qui survolaient la ville.

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21h36, l'ambassade de France demande à tous ses ressortissants de rester chez eux. sms : ce soir ça va pêter grave de chez grave.
Etrange sentiment dans un pays quasi inconnu, à la population pour le moins mystérieuse. Une curiosité mêlée d'inquiétude. Le seul soucis réel de cette soirée a été un cafard géant qui s'est téléporté dans ma chambre, horreur sur patte que j'ai éradiqué à la bombe avant de le passer la fenêtre. Une mort atroce le pauvre. L'autre jour c'est à une guêpe démesurée que j'ai réservé ce sort, mais la voyant se contorsionner douloureusement, je l'ai écrasée avec une chaussure; chose que je me suis abstenue de faire avec mon invité nocturne.
Cette histoire parait déplacée, elle ne l'est pas, elle est réelle. Le coup d'état charrie une trop forte dose d'irréalité. En France, je connais les mentalités, les réactions, les sens, les prévois. Ici tout est impromptu, je ne ressens pas les mœurs (après avoir arrêté de les déduire de façon erronées), les attitudes. Les thaïlandais sont incompréhensibles, nos deux cultures totalement hétérogènes. Impossible de rapprocher l'une de l'autre, d'interpréter un comportement thaïlandais avec un esprit français.
J'attends donc que ce que je n'ai jamais vécu (un coup d'état), dont je n'ai aucune idée, ait lieu ce soir. Ou pas. Des grenades, des fusillades, des bombes, dans le coin, très loin… je n'en ai pas la moindre idée. L'habituelle exagération de nos journaux télévisés ne donne aucun renseignement sur la réalité des faits et le ressenti à leur égards. 22h05, pas de nouvelles, pas de bruit, j'ai fermé la fenêtre. 22H27, je l'ai rouverte, j'entends le flot continu des voitures qui ce soir charrie des ombres. De ma demeure la ville serait calme sans la tension sous-jacente que je lui prête. Les lumières scintillent trop vite, le ciel est trop rouge, le silence trop profond ou le bruit trop uniforme.
le jour se lève, rien à signaler.

mercredi 26 novembre 2008

0325

DECLARATION DE LA PRESIDENCE DU CONSEIL DE L’UNION EUROPEENNE SUR LA SITUATION EN THAILANDE. (BANGKOK, 26 NOVEMBRE 2008)

L’UNION EUROPEENNE EXPRIME DE SERIEUSES PREOCCUPATIONS SUR LA NOUVELLE DETERIORATION DE LA SITUATION POLITIQUE EN THAILANDE, EN PARTICULIER SUITE A L’OCCUPATION DE L’AEROPORT INTERNATIONAL DE SUVARNABHUMI, QUI A PROVOQUE L’INTERRUPTION DU TRAFIC AERIEN INTERNATIONAL ET LE BLOCAGE OU LE DE-ROUTAGE DE MILLIERS DE PASSAGERS.

L’UNION EUROPEENNE RAPPELLE QUE LE GOUVERNEMENT THAILANDAIS A LA RESPONSABILITE DE PROTEGER LES CITOYENS THAILANDAIS ET LES ETRANGERS. L’UE APPELLE LES AUTORITES THAIES A RESTAURER LA SECURITE ET A GARANTIR L’ORDRE PUBLIC EN ACCORD AVEC LES PRINCIPES DE L’ETAT DE DROIT.

L’UE CONSIDERE QUE CES DEVELOPPEMENTS SONT DOMMAGEABLES POUR L’IMAGE INTERNATIONALE DE LA THAILANDE.

TOUT EN SOULIGNANT QU’ELLE N’ENTEND INTERFERER, EN AUCUNE MANIERE, DANS LE DEBAT POLITIQUE INTERNE, L’UNION EUROPEENNE REAFFIRME SON PROFOND ATTACHEMENT A LA DEMOCRATIE EN THAILANDE. L’UE DEMANDE A TOUTES LES PARTIES IMPLIQUEES DE RESOUDRE LA CRISE POLITIQUE PAR DES VOIES PACIFIQUES DANS LE CADRE DE L’ETAT DE DROIT. L’UE REAFFIRME QUE TOUTE TENTATIVE ANTI-CONSTITUTIONNELLE D’ENFREINDRE LE PROCESSUS DEMOCRATIQUE AURAIT UN IMPACT NEGATIF SUR LES RELATIONS UE/THAILANDE.

Du centre ville, j'entends le flot sourd des voitures, aucune trace des émeutes en cours. Le PAD a assiégé l'aéroport international hier soir tandis que des manifestations au nord ont fait quelques blessés. Le Monde relate l'évènement légèrement fatigué par les revendications du PAD, Libération se veut plus proche d'eux (incluant tout de même un documentaire sonore de leur envoyé à BKK), le Figaro ne mentionne rien; il doivent entendre les voitures…

Le même jour, je reçois l'appel d'une responsable d'un grand magasin :
Hello Mam, I call from the Siam Paragon,
If you come today you have 25% discount.
un passage en anglothai plus tard:
but If you come saturday, you have 30% discount. (!?!)
So I think is better if come saturday.
Que dire de plus ?

lundi 24 novembre 2008

0324

L'endroit vide dans lequel je séjourne ne veut pas se remplir; ou se remplit de n'importe quoi, de litres d'eau.
J'ai attendu un mois que le parquet prenne vie, imaginant une lame d'orchidée, quelques bananiers, voire une simple couche d'herbe. Rien. Le bois n'a fait que dégurgiter la peinture de l'enduit pour enlever un peu à l'espace. L'espace tend à se vider.
Accueillie de la sorte, je ne savais pas vraiment où me mettre, évidemment je gène. Je tente de faire partie du décor, me cale dans un coin, sur une petite table de rue, laissant à l'étendue le plus de champs possible, rabats mes affaires dans de gros sacs en plastique et attend sa réaction. Il chauffe mais ne m'expulse pas.
Nous en sommes à l'étape de l'apprivoisement. Apprivoiser un espace n'est pas si aisé, on n'entre pas dans une pièce vide en l'emplissant, même si l'on projette d'y installer telle et telle chose, les projections ont vite fait de s'évanouir le jour levé ou la nuit tombé. Notre contour se définit à mesure que nous tentons de lui faire adopter les dimensions de la pièce, nous nous retrouvons étriqués dans notre masse alors que les angles saillant ressortent, indiquant clairement que rien dans notre physionomie n'est semblable, qu'une osmose est impossible qu'en somme la coquille est anguleuse et autonome.
Elle a bien essayé de m'éjecter sous la caresse du vent : A mon retour, une température agréable m'accueillait, bercée par de somptueux courants d'air. Ce qu'elle m'avait caché dans sa grande bonté spatiale, était le flot de moustiques qui utilisait cette voie aérienne pour me dévorer, paupières comprises. Borgne, je m'enduis les jours suivant de crème anti-moustique et entamais la guerre perdue d'avance contre l'espace, déployé du nord au sud. Insecticides, crèmes, fenêtres fermées, sueurs… J'ai finalement pris le parti de l'anéantissement, appuyé sur le bouton et mis la climatisation dans la chambre (mi-coupable pour la planète, 1000% heureuse pour moi). Ainsi j'ai pris possession d'un lieu, du moins pendant mon sommeil (le reste du temps il s'impose comme territoire inoccupé).
J'ai fini par étendre l'air clos à mon bureau en le climatisant à ses heures, tout en restant sur mes réserves, dans un coin stratégique qui me permet d'observer la porte d'entrée, la cuisine et le balcon. (Non que j'attende quelque visite, loin de moi l'idée de polluer l'espace, et quand bien même, j'avais organisé une petite réception en septembre, les membres présent ne savaient où se mettre.)
Je restais silencieuse quelques semaines, ne grésillant l'atmosphère que par l'écoute rationnée de musique sur mon ordinateur. Sa crépitation quasi inaudible ne dépassait la table que pour couler vers le sol et être absorbée soit par les lames du parquet flottant, soit par des vagues d'air disposées à cet effet.
Il faut dire que moi mise à part, je ne fais pas d'efforts pour remplir l'espace qui me domine. Le son lui-même se perd ou résonne contre les murs lointains qui me le renvoient quelques secondes plus tard à la gueule. La vue qui s'étend du Sud Ouest au Nord Est n'aide pas à définir les contours de la pièce. Seule la nuit et la lumière intérieure permettent de déterminer un volume humain (que la pièce ne lise pas ce texte sinon je suis expulsée). Apprivoiser l'espace…
Il me faut remplir à tout prix, c'est devenu urgent, avant que la pièce ne m'apprivoise et me remplisse de vide. A qui remplira l'autre en premier.
Aussi, aujourd'hui j'ai décidé d'apprendre à remplir. Remplir est une activité paisible, qui fait appel à une concentration instinctive, un intérêt présent et laisse parallèlement l'esprit libre d'écouter une émission de radio (proche de l'ordinateur cela va sans dire).
C'est un plan défini que j'ai choisi pour cette activité de sauvetage, une feuille de papier, un stylo, un principe minutieux et j'ai rempli. Rempli, rempli, rempli. J'en ai retiré une immense satisfaction, telle que la pièce en a perdu son espace devenu le mien, quelle que soit la surface utilisée. Cette activité m'a permis de brancher les enceintes (en équilibre sur la table qui a du mal à contenir l'ordinateur, les enceintes une feuille et un stylo, les appareils technologiques qui servent à l'écoute sont pour moitié dans le vide). Pour l'heure j'en suis à l'apprentissage, et j'ai le temps. Je vais en remplir des deux dimensions, vous pouvez me croire. Je vais les remplir ici même, en écoutant des émissions ou de la musique sur de ENCEINTES en ALLUMANT les lumières nécessaires, et en mettant la CLIMATISATION. Je vais remplir des pages jusqu'à ce qu'elle forment un tout, résolument plein, prêt à… Non mais j'ten foutrai des espaces snob.

dimanche 23 novembre 2008

0323

Le comportement diffère du tourisme à l'immigration, par exemple je ne porte plus mon chapeau, aussi certain qu'à la veille des années 60, les esprits étaient passionnément portés vers le futur, ses possibles et la musique. Il suffit de lire les nouvelles de Ballard et de K.Dick, la musique avait le même pouvoir téléportatif particulaire que les vaisseaux spatiaux ; elle était propulsée au rang de source d'énergie primaire. Ce que l'on retrouve de nos jours en ayant pris soin (on ne saurait être trop prudent) de séparer ces deux mots.
Il faut à présent que j'aille sonder le parc en bas de chez moi, la raison pour laquelle j'habite ici est en train d'être hachée en rondins. Mon arbre fantôme se désagrège, tandis que les habitants des taudis adjacents continuent de faire du vélo rouillé au son du clairon de la base aérienne…

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lundi 17 novembre 2008

0322

L'homme ruisselle d'humanité. Déverse sur qui n'a pas compris que la vie est belle mais dure des torrents de preuves. J'ai nommé Sean Pen.
Acteur, il vous embarque avec son fardeau vital, de béatitude souffreteuse, son rire contrastant avec la profonde douleur que dévoile ses yeux battus pas les épreuves de millénaires de prédécesseurs. Il en porte les tourments, sa conscience est stridente son cœur (bat) sur la main, miséricordieux et accablant.
Sous quelques recommandations j'ai finalement accepté de voir son film, écrit et réalisé par Saint Sean, Into the wild.
L'histoire (une histoire vraie) est intéressante, aurait pu être poignante si cette éponge de mansuétude s'était abstint d'y mettre sa mer de sel.
Une déferlante de musique à textes empli l'espace poétique de paysages grandioses pour nous en faire comprendre le sens. Surligner sans cesse, appuyer, se gargariser de peu de paroles au détriment d'un jeu à la limite du grotesque.
On écoute, on comprend l'autre, ses difficultés, ses peines, on a en soi l'énergie vitale transcendante, et on va vous le prouver : hop, quelques pas de vie. D'assis le personnage se dresse sur ses pattes et galope dans les roches, bras en l'air, embrassant l'universalité et sa splendeur. Avec ou sans témoins. Cette interprétation téléguidée par notre guru ne laisse que peu de jeu à un acteur certainement bon. Après avoir bousillé les paysages, il arrive à bousiller le personnage. Gros plan sur son visage nous permettant de découvrir au cours du film la profondeur qui anime notre héros. C'est un héros. Héros solitaire qui se dresse majestueusement sur le toit de son bus magique en Alaska, bras en croix sous un soleil couchant, hurlant silencieusement sa joie pendant que la musique bat son plein et nous explique…
Si l'histoire est vraie, le film est faux. Décortiquées à loisir, le choix des scènes fait pleurer dans ma chaumière ; d'exaspération.
Explications en voix off, qui des parents, qui de la sœur, le caractère du héros, tout est clairement identifié avec les mots Justes, synthèse parfaite qui évitera au spectateur les erreurs d'interprétations. N'allez pas vous égarer sur un quelconque terrain à fautes, personne n'en fait, tout le monde est bon, chacun avec ses obligations, caractères…
Les rencontres appellent d'autres drames, passés sous lourd silence dont on aura l'explication quelques temps plus tard à n'en pas douter. En effet, si la mise en suspens est une caractéristique intéressante, elle l'est bien moins lorsque tout retombe à point nommé un quart d'heure plus tard. De la simili vie pour un simili film.
Rien de grand, même les espaces vierges sont encadrés, fermés par l'accompagnement lorsqu'ils ne sont pas barbouillé de notes du protagoniste. Into the screen, à peine mieux que ça (et je l'ai vu sur l'ordinateur, il n'en menait pas plus large) Le plus intéressant est la fin, qu'il ne doit qu'à la véracité du récit. On reste sur sa fin, et c'est tant mieux, le reste s'évapore du pays des Barbapapas du (dés)espoir.

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samedi 15 novembre 2008

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Je suis dans les parages, je sens ma présence en positif, tels deux aimants qui se répulsent, le vide creusé entre nous n'est qu'un gouffre de néant. J'arrive de l'occident, je suis en orient, rien ne relie plus ces deux pôles de l'univers, rien ne relie plus la veste en cuir et la brume. Il faut attendre que le courant passe.

Hollywood comme maître à penser, précurseur des temps modernes ne s'y est pas trompé, le présent est aux morts vivants, catégorie majeure de la population occidentale. Je dénote trois catégories distinctes (hormis les exceptions) : les morts vivants en nombre écrasant, les déjà-morts, et les présents. Cette dernière catégorie est rarissime, j'en connais quelques uns, le cœur sur la main, l'âme ouverte. Les déjà-morts, s'activent dans le non sens, attirés par la vie, ils n'ont de cesse de chercher à vivre, à survivre, trop conscient de la rupture, de sa brutalité, de son pouvoir de désintégration. Les déjà-mort courent avant le temps, pour ne pas en être esclaves ; où à contre temps, certains croient s'arrêter. Des pauses (ir)réelles sous substances quelconques leur permettent d'entrevoir la vie qu'ils souhaitent et regagner l'énergie qui, s'ils ne sont pas encore guéris de leur mort, les escortera dans leur prochaine quête de vie. Rien n'est défini, rien n'est définitif.

Les morts vivants, la majorité, est née sous l'illusion d'une liberté dont ils se gargarisent, suivant les pavés rutilants des protections et autres assurances, les bras en avant, certains légèrement ballants, à la limite du doute… non pas du doute, de l'épuisement, d'autre les bras bien droits, droit devant, droit dans le mur. Mais comme chacun sait les morts vivant n'y voient que dalle, et s'ils y voient, ils voient leurs proies. Avides de rien, ils déambulent avec circonspection et circonférence. Un petit tour et puis reviennent, un tour plus large, c'est l'ascension, une orbite supplémentaire, la consécration jusqu'au contact fracassant contre le globe de verre poli qui les protège. Les morts vivants vont en circonférant, toujours tout droit, toujours tout droit, les bras devant, les ongles longs, abrutis. Une société d'abrutis qui se presse dans un monde fini. Qu'ils aient la peau qui flanche, un coup de botox les ragaillardit pour quelques temps, les bras plus haut, le regard plus vague, embué par tant de félicité. Les morts vivants sont légion, ils nous amuseraient si leur sort ne nous faisait pas pleurer. L'occident considère la fin en la grimant, en l'occultant; c'est là sa défaite. Pas de renouvellement, l'hiver emporte tout sur son passage, blanchissant à jamais leurs pages déjà écrites. Ils avancent droit devant, la tête haute, le corps déséquilibré, raclant le sol dans l'espoir de laisser quelques traces d'êtres indélébiles. Ce serait une révolution si toutefois ils avaient recouvré (ouvert) leur esprit. Que nenni, le chemin est tracé, les buts à atteindre, se succédant de plus en plus rapidement pour voiler le but final : la mort dans la gueule.

Je me rapproche, je sens mon souffle occidental derrière la porte. Je sens mon souffle oriental qui lui fait face. Personne ne bouge. Pas un geste, pas encore. J'ai trop puisé dans la finitude ces derniers temps, gagnée rapidement par cet univers familier qui m'est tombé dessus, je me suis tombée dessus, un avion m'a importée. En traversant la ville en taxi, j'ai noté des infirmes, des pouilleux, des petites gens, même des vieux, affairés dans la rue, côtoyant les puissants, sans un regard les détachant de leur occupation en plein air. Air pollué, rats poilus, sourires aux lèvres. Là. La vie à tous ses stades s'affiche sans honte, a ses droits. La mort est un état, un passage, à l'instar de la végétation qui renait sans cesse, jamais la même, issue d'elle-même.

Dans notre cage de vérité, sous des mains crevassées d'or aux ongles saillants, nous les parquons, incapable de faire un lien quelconque avec ce qui nous ressemble. Innommable, cachons. (L'innommable fait angoissante figure sous ces latitudes - décalage ? -, je perds en sérénité. Issue de moi il n'a rien d'effrayant, décrit par autrui (Becket), il m'embarque dans les méandres d'une vision trop familière, qui ne devait pas se déployer si justement.) Le droit chemin, peuplé de bruit de diversions, de distractions est le but, le seul, qu'il tourne en rond requiert un regard. Mais le regard est vide, vide de loin, vide d'autrui, vide de soi.

Je vais ouvrir dans un instant, avant… qui de nous deux parle ?

C'est une onde qui se dégage de deux corps simultanément. Plus tard viennent les mots, la normale, l'onde est là, chaude et puissante mais refoulée à l'état social. Ce sont des années qui passent, des affaires d'importance qui s'immiscent, des départs, des oublis, puis une étreinte. Dans mes bras le corps de l'autre s'emboite parfaitement, je sens les côtes, le dos, ma main repose sur le flanc opposé. Pas un jeu, pas un je dans cet enlacement, un tout. La respiration se fait au même rythme affolé, embué, les bouches se joignent d'une solide frénésie. Un instant, ni trop court ni trop long, l'instant. Les corps se séparent, les visages s'illuminent, les pavés claquent…

Maintenant je peux entrer, vienne qui sera, advienne que pourra.

jeudi 13 novembre 2008

0319

Un son.
Pour la première fois depuis mon arrivée, mon esprit s’élança au-dessus des voitures et scooters terrestres qui peuplaient jusqu’alors mes somnolences nocturnes, pour s’inviter dans le sillage céleste d’un bloc d’acier qui me transporterait le lendemain. Depuis ce ne fut que sommeils intermittents, dérangés par des hôtesses de l’air, sas, vols, jus de fruits, bercés par Wall-e, une business class inattendue, éveillés par un moustique insomniaque sous une lune trop pleine pour se rendormir. Ce soir encore le sommeil vacille devant mes yeux, ivre de nuit, ivre de jour, instable de considérer mon corps dispersé dans un espace trop lointain. Une part de moi déambule à ce moment même dans les rues froides de Paris, sous une veste en cuir marron et un pull bleu marine, ramassant ses bras contre son torse pour réchauffer un corps frigorifié et absent. Je longe la ruelle sur un pavé glissant, titube dans les feuilles mortes, discute avec mes amis, bois des litres de liqueur et me retrouve plus tard, au même moment, dans cette mezzanine rassurante aux draps bleus. Sons d'automobiles où de chat miaulant; son d’un avion à réaction qui s’octroie l’univers.
À mille miles, sous une chaleur agréable, une brume entourée d’un corps solide écrit ces lignes. Pas d’avion dans le ciel, des lumières multicolores, des feux d’artifices, le son très proche d’une petite boule de bois qui s’abat régulièrement contre le mur blanc et, plus lointain, celui des voitures qui roulent en sens inverse. De cette brume n'émane aucun sommeil, aucune veille non plus. La brume au corps vide attend dans ses limbes qu’un corps frigorifié qui hante une autre capitale reprenne contact. Le son incessant des automobiles qui se déverse dans l’espace appuie sur le mouvement perpétuel, et empêche l’esprit de se caler dans son univers d’attente. Je n’entends que le mouvement des véhicules qui se dirigent vers l’ouest où rôdent mes restes à la recherche de repos. Deux réalités se superposent, créent des décalages temporels, géographiques, parasitages d'un autre ailleurs à répétitions. Ici n'est pas encore là.
En attendant, les chiens hurlent, la nuit avance ses heures, ni plus longues, ni plus courtes. Seul mon insensé désir de dormir lui offre une teinte irréelle d’aube éternelle.

mardi 11 novembre 2008

0318

Rothko s'en va en guerre… P1010125.jpg

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Plumes de pluie et affluents

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jeudi 6 novembre 2008

0315

One night in Paris P1000847.jpg J'y suis presque, ah ben non. Pause. Toc eu. Ok. the sound's about… ah ben ça c'est Circle Square ok on est raccord. Ok. C'est bon. Pause.
HumHum, un morceau démarre sur la chaîne. Hard to believe, they never had to leave… stop. Reprise de la batterie. Une reprise de Wham Careless whisper. A mon avis c'est ça. Avec le batteur de strokes. yeeeee. Batterie. Ah oui est-ce que celui là je ne te l'ai pas enlevé tout à l'heure ? Krrrrrrrrrr. J'adore Eden Ahbez. Mais enfin bon tu l'entends par intermittence… Ah j'ai encore un truc super pour toi, qui nous vient d'Islande. Qui nous vient pas d'ailleurs mais.
Putain j'ai refais la même connerie… Ambiance spaciale, stop, ambiance spatiale, la chaîne fait des siennes. Pause. Et Juana Molina ? Et puis ça coupe, c'est normal. Temps de coupe a capella. Musique. Coupe.
T'aimes bien ça où pas ? ouais. Nananyannananyanayannaynannaynnanaynanana ? Et hop j'te cut. Bon. Ah non pas de photos de moi, que des photos abstraites. En même temps c'est un peu espagnol je sais pas si t'aimes bien. On change. Rrrhhh hhhhhh. Guitare espagnole et xylophone. Toi t'aimes pas forcément les trucs psychédéliques ? T'ain c'est agréable, franchement. Et hop un p'ti cut. Et j'retombe sur la nouvelle Eric Truffaz. Ah puis là j'suis sur Bkk 08… Marianne Faithfull, c'est vrai qu' c'est pas inoubliable son truc. Intermèdes musicaux Oh putain c'est trop chiant c'est cut.
Et voilà, retrait de périphérique !

Merci Marie.

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mardi 4 novembre 2008

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Il est 16h48, ça ne s'invente pas.

dimanche 2 novembre 2008

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vendredi 31 octobre 2008

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jeudi 30 octobre 2008

0311

La nuit prend de l'avance et lacère les pâles de pluie qui s'abattent mielleusement sur une capitale asphyxiée. Du jour premier ou les ravages s'agrippèrent à moi telles des sangsues dentées, à cette froide nuit d'octobre (23h23 tout de même), mon corps suinta, déversant sur les pavés et les trottoirs des perles de chair scellées par le froid et l'écœurement. Paris, ses rues trop courues, ses quartiers trop connus n'y sont qu'en guise de décor. Ses personnages, en qui une fois, des mois, des années j'eus confiance, en furent les moteurs. De moi il ne restait que quelques os, un cerveau endommagé, largué au delà de sols à présents gelés, relégués à l'état de regrets, défaite dont la force centrifuge me trainait lentement et sans aucun doute dans un empire mille fois foulé, le néant du Chez-Soi. Chez soi sans soi se révèle chez lui. Chez moi a été ratissé pendant mon absence, volé, violé, usurpé et souillé. Il n'en reste rien; il m'accueille à bras ouverts. Bienvenue à la maison.
La carcasse branlante et bondée dont les sarcasmes sans recul prennent de tristes allures de voix rayées s'amoncellent et se referment sur l'idée, le lieu, le repère, le point d'ancrage. Absorption vs abandon. Le choix est dur, le choix est inconcevable, je ferme les yeux et m'expulse. J'ai fermé les yeux emplis de larmes, de lames, et m'en fus, ailleurs, rongeant les résidus d'une illusion perdue, emplissant mon sang de suc acide. Sur ce je dois quitter les lieux, les tripes retournées, l'esprit amputé, les cheveux rouges. J'ai vu jour après jour se dégrader l'amitié, la confiance ; les individus virer des couleurs chatoyantes de l'affection à la grisaille de la déception. Sur ce je pars, je dois quitter les lieux sans plus tarder. Le gris s'étale, le gris s'en régale, le gris boit à ma santé, danse à ma liberté, écrasant sans précaution mes larmes de chaires imprégnées sur un sol qui fut mien. Sur ce je quitte les lieux. Sur ce je quitte les lieux. Sur ce tu dégages oui, clame t-on la bouche fermée, le sourire douillet affairés tels des autruches à se cacher de la seule chose qui me reste : ma vue et son point. Sur ce je quitte les lieux.
Partir est une chose, revenir en est une autre. Du retour on apprend beaucoup, sur soi, sur les autres, sur ses attaches que l'on minimisait, sur les amitiés que l'on exagérait. Restent les amitiés, les vraies, les lieux, les odeurs, les paysages, le froid sur les doigts, le temps sur les gens. C'est un cadavre prescrit qui ne suit pas la règle, qui n'utilise pas les mots du mois mais les maux des moi et mois. A revenir on apprend qu'on est parti. A revenir on nous fait comprendre qu'il faut partir. Je dois quitter les lieux… Mais pas ainsi. Je ne vois plus l'horloge, il ne peut être 24h24 encore, une chance que je m'en sois cachée. J'ai donc décidé de rester, d'appeler à moi tous mes cailloux de peau semés ce dernier mois, de ne pas les laisser se faire piétiner mais d'en appeler à leur position stratégique pour décider de mon départ. Car maintenant il faut que je construise le départ et non qu'il se définisse de lui-même en m'évinçant de l'équation. Quelquepart revient quelques jours, à Paris. Chez moi.

lundi 20 octobre 2008

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samedi 18 octobre 2008

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L'ombre de soi-même divisée en fractales n'a pour reste qu'une monade négative.
Fin des nombres premiers.

samedi 11 octobre 2008

68

Quelque part
Le reste suit

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